nov
10
2021

Ecole fondamentale : controverse sur une leçon de sexualité

Dans le cours des Sciences humaines, une leçon sur la sexualité a été introduite dans les classes de 7e, 8e et 9e année. L’archidiocèse de Gitega parle de dégradation des valeurs humaines. L’avis diverge chez les éducateurs et parents.

« Les jeunes, l’amour et la sexualité » ou encore « Les droits des jeunes et les services adaptés en matière de sexualité et santé de la reproduction» sont entre autres les leçons comprises dans le cours des Sciences humaines de la 7e à la 9e année. Ce 4e thème (qui comprend 20 pages) du manuel de l’élève est réservé à la sexualité et santé reproductive.

Dans une lettre adressée au ministre de l’Education, l’archidiocèse de Gitega lance un cri d’alarme : « La leçon 12 intitulée ‘’Les droits des jeunes et les services adaptés en matière de sexualité et santé de la reproduction’’ incite les jeunes aux vagabondages sexuels. Elle apprend aux jeunes que le plaisir sexuel est un droit pour eux sans aucune explication. »

Le département de la pastorale et de la famille de l’archidiocèse de Gitega demande que cette leçon soit supprimée du programme pour être remplacée par une autre qui encourage les jeunes à l’abstinence comme prône la culture burundaise. « Il faut que le gouvernement arrête la distribution des contraceptifs aux jeunes. Ils sont réservés aux couples qui le désirent pour l’espacement des naissances».

Certains éducateurs pas du même avis

La directrice du lycée municipal Rohero, qui a aussi enseigné ce cours, affirme que cette leçon a une raison d’être, vu comment le monde évolue : « S’ils n’apprennent pas cela en classe, ils vont l’apprendre ailleurs. Par la télé, l’internet… » Elle évoque des cas d’élèves attrapés en train de regarder des vidéos pornographiques en classe : « Il vaut mieux que les élèves l’apprennent en classe ou par les parents. Sinon, ils feront ce qu’ils veulent et les conséquences seront fâcheuses». Mais si c’est un programme scolaire, il apprendra beaucoup plus les conséquences de ces actes, soutient la directrice.

D’après cette responsable, au cours de cette leçon, les élèves donnent l’impression d’avoir déjà des notions. « Mais ils sont très réticents à poser des questions, car c’est un sujet tabou ». Pourtant, elle a observé qu’ils sont très intéressés par la leçon.

Elle signale que même des enseignants sont gênés quand ils enseignent la leçon : « Au point que certains préfèrent passer le relais aux autres enseignants quand ils atteignent ce thème. »

Elle estime que cette leçon sur la sexualité est aussi un prétexte pour les parents pour oser parler à leurs enfants : « Avec notre culture, il est très difficile voire impossible que les parents parlent de la sexualité avec leurs enfants. Mais si l’enfant a appris une leçon en la matière, il sera plus facile d’évoquer le sujet. »

Cet enseignant des Sciences humaines estime important de parler de sexualité aux élèves.
Même son de cloche chez un enseignant de ce cours en 7è, 8è et 9è année au lycée Notre dame de Rohero : « La santé sexuelle et reproductive est une notion très importante dans la vie courante des élèves. Il faut qu’ils sachent comment se protéger contre le sida ou les grossesses non désirées. » Et d’enfoncer le clou : « Il faudrait que la leçon commence dès la 5è primaire, car les enfants de cet âge sont aussi victimes de viol. »

Une leçon qui empire la situation

Des parents rencontrés parlent d’une leçon qui dépasse l’âge des élèves concernés.

Alors que son fils de 11 ans, élève en 7e, est en train de réviser, un papa de quatre enfants raconte qu’il est tombé sur le mot ‘’fécondation’’. « C’était trop pour moi. Il est trop petit pour apprendre cela».

Pour ce père, il faudrait commencer à parler de sexualité dès la 9e ou 10e année, à l’âge de 14 ans au moins. « Car un enfant de la 7e année est à l’âge de la puberté, de la découverte du changement de son corps». S’il commence à apprendre les notions de sexualité, souligne-t-il, il va chercher à essayer ce qu’il apprend et ainsi il sera incité à la débauche. En outre, il fait remarquer que cela va multiplier les grossesses non désirées.

Un autre père estime également qu’il ne faut pas enseigner ces notions à des enfants en bas âge : « Ils vont chercher à découvrir ce qu’ils apprennent car ils ne sont pas assez matures. »

Une maman de quatre enfants confie qu’elle était sidérée quand elle a appris que la sexualité fait partie du programme : « C’est détruire notre culture. » De surcroît, elle estime que cette leçon existe depuis longtemps, mais les grossesses perdurent.

Même les enfants semblent très gênés avec cette leçon, déplore cette maman. Elle affirme que quand elle tente de parler de cette leçon avec son fils, ce dernier ne veut pas en entendre parler. Il devient timide. Il change immédiatement de sujet. « Donc ils ne sont pas encore prêts. Les concepteurs sont allés au-delà de la culture et de l’éducation du Burundi. C’est la culture qui construit le pays et la société», conclut-elle.

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