aoû
28
2021

Jérémie Ngendakumana : « Je rentre »

A la veille de son retour au Burundi après six ans d’exil, Jérémie Ngendakumana s’est confié à Iwacu. Il ne demande rien, mais il sera disponible. « Si besoin il y a », dit-il.

L’ancien président du CNDD-FDD arrive à l’heure dans le café bruxellois où il m’a donné rendez-vous. De prime abord, il semble rigide, mais ce n’est qu’une impression. Jérémie Ngendakumana se détend très vite. Un petit verre de vin rouge. Puis, il répond avec sérénité. Il dit qu’il a mûri sa décision. « Après six ans d’exil, j’estime qu’il est temps de rentrer, de me mettre à la disposition de mon pays et donner ma contribution, si minime soit-elle à l’édification de ma patrie. » L’homme pèse chaque mot. Est-ce un opposant qui rentre? Un membre du parti? Comment se situe-t-il aujourd’hui sur l’échiquier politique? La réponse fuse tout de suite. « C’est un citoyen qui rentre. Depuis qu’on m’a exclu du parti CNDD-FDD le 10 avril 2015, je ne suis membre d’aucun parti politique. Sur le plan politique, j’estime qu’il y a moyen d’être utile à la nation sans pour autant être nécessairement membre d’un parti politique. » Néanmoins, on sent comme une pointe de regret quand on lui demande ce qu’il ressent vis-à-vis de son ancien parti aujourd’hui. « J’ai vu le CNDD-FDD naître comme mouvement, je l’ai vu grandir jusqu’à devenir un parti politique que j’ai même dirigé. Il s’est donc créé des liens très solides avec ce parti pour lequel j’ai consenti beaucoup de sacrifices. »

Il confie que dans for intérieur, il épouse et soutient toujours les idéaux et les principes du CNDD-FDD. Mais il ne veut pas en dire plus. On sent une certaine réserve, surtout quand on lui demande ce qu’il va faire « concrètement » au Burundi. Il confie qu’il se mettra à la disposition de la république, cette dernière pourra bénéficier de son expérience politique et professionnelle. « Si besoin il y a », nuance-t-il.

Quid de sa sécurité ? Les raisons de son départ en exil ne sont donc plus de mise? La réponse est plutôt philosophique. « Le concept de sécurité est une notion quelque peu relative. Chacun l’apprécie à sa façon. Je rentre avec Pamphile Muderega. Au moment où nous rentrons, je n’ai pas de doute qu’il y en a qui voudrait quitter le pays. Pour moi l’essentiel est que je me sens serein et en ordre avec ma conscience. » Pour son retour, Jérémie Ngendakumana explique qu’il a été simplement à l’ambassade du Burundi à Bruxelles pour demander un laissez-passer tenant lieu de passeport. « Les autorités savent donc que je vais rentrer et elles ont de manière tacite marqué leur accord. »

Concernant les autres personnalités politiques qui sont toujours en exil, l’ancien patron du CNDD-FDD estime que la décision de rentrer « est toujours une décision personnelle et ne requiert l’avis de personne d’autre. » Néanmoins, il pense que l’accueil qui leur sera réservé « pourrait être une inspiration positive ou négative pour les autres. »

Jérémie Ngendakumana regarde sa montre, il a encore quelques courses à faire avant de s’envoler ce dimanche. De l’exil il dit qu’il a beaucoup appris : « L’exil vous éloigne de votre pays, de vos parents, de vos amis et de vos connaissances. On se sent toujours étranger dans le pays d’accueil et cela crée un sentiment d’angoisse que je ne souhaite à personne. » Mais cette expérience n’a pas été totalement négative.

« Je ne connaissais l’Europe que de passage. J’ai découvert certaines réalités de l’Europe, j’ai observé avec attention comment dans ces pays les citoyens sont organisés, l’administration, le système de sécurité sociale, le système politique, notamment ce dialogue permanent entre des courants politiques antagonistes en Belgique. Tout cela est très instructif. »

L’heure file, il attrape sa veste. Dimanche soir, il sera au Burundi. « On n’est nulle part mieux que chez soi », me lance-t-il avant d’aller attraper le prochain train pour Liège.
https://www.iwacu-burundi.org/jeremie-ngendakumana-je-rentre/

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