jui
15
2020

Les enquêteurs de l’ONU attendent du nouveau président burundais un acteur du changement

Mardi 14 juillet 2020 à Genève, la commission d’enquête des Nations Unies pour le Burundi a présenté un rapport oral devant le Conseil Onusien des droits de l’homme. Ce rapport intervient quelques jours après les élections générales, émaillées de cas de violation de droits humains selon trois commissaires onusiens.

 

“Bien qu'aucune violence massive n'ait été documentée, le processus électoral a été caractérisé par l'intolérance politique et de multiples violations des droits de l'homme, avant et pendant la campagne électorale officielle, le jour du scrutin et après l'annonce des résultats officiels des élections”, a résumé Doudou Diène, président de la Commission d'enquête des Nations Unies sur le Burundi.

 

Selon ces enquêteurs, “il faut plus qu'un nouveau président pour briser le cycle de la violence au Burundi” à fin que les réfugiés burundais rentrent massivement.

 

“Les cas de violations de droits humains et d’atteintes à liberté doivent cesser, les auteurs de ces cas comme les Imbonerakure, les agents du service secret ou peut être les membres des groupes d’opposition doivent être punis et le respect des libertés publiques doit être reconnu à tous. Sans oublier la libération des prisonniers politiques, des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme. Les centaines de milliers de réfugiés n’attendent que l’assainissement du climat dans le pays pour rentrer” a souligné Mr Doudou Diene.

 

 

Les Commissaires ont pris note que dans son discours d'investiture du 18 juin, le nouveau président Evariste Ndayishimiye a souligné “la nécessité d'améliorer la situation des droits de l'homme et la lutte contre l'impunité dans le pays, ainsi que l’importance d'œuvrer à la réconciliation politique et au retour de tous les réfugiés burundais”.

 

Cependant, ils ont également souligné que les politiques du nouveau président seront mises en œuvre par un gouvernement composé essentiellement des alliés du régime du défunt président Pierre Nkurunziza, dont certains sont sous le coup de sanctions en raison de leur implication dans de graves violations des droits de l'homme.

 

La Commission a appelé le nouveau président de la république à démontrer sa volonté de changement en coopérant pleinement avec les mécanismes internationaux des droits de l'homme, dont cette commission d’enquête et en rouvrant le Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’homme au Burundi

 

Réaction de Gitega

 

D’après l’Ambassadeur Rénovat Tabu, représentant permanent du Burundi auprès de l’ONU à Genève, le vrai mandat de cette commission est de tout faire “pour faire changer le système de gouvernance au Burundi” et “d’un mécanisme avec un agenda géopolitique minutieusement et librement accompli au profit notamment de l’opposition politique burundaise”.

 

 

Il ajoute que “le contenu des rapports de cette Commission n’offre pas l’odeur et la qualité d’une expertise onusienne neutre, raison pour laquelle le Burundi réaffirme son refus de coopérer avec une telle Commission”.

 

La commission d’enquête des Nations Unies a été mise en place en 2016, dans la foulée des violations graves des droits de l’homme dénoncées par la société civile burundaise et l’ouverture des enquêtes de la cour pénale internationale, CPI, pour établir des responsabilités pénales.

 

Ce chaos a résulté de la crise politique suscitée par le 3ème mandat du défunt président Pierre Nkurunziza (décédé en Juin dernier), jugé d’illégal et d’anticonstitutionnel par ses détracteurs.

 

L' Ambassadeur Rénovat Tabu a rassuré que par les élections de 2020, le Burundi vient de marquer l’histoire et tourner la page avec la transition pacifique au sommet de l’Etat et la mise sur pied d’un nouveau gouvernement. Ce diplomate invite plutot les différents partenaires à changer de vision et poser des gestes de bonne coopération au développement.

 

Du déni à la volonté de s’attaquer à la Covid-19

 

Par ailleurs, la Commission d’enquête s’est félicitée du fait qu’à la suite de la mort inopinée du Président Pierre Nkurunziza le 8 juin dernier, le nouveau Président burundais a décidé de “s’attaquer sérieusement à la pandémie de Covid-19, après des mois de déni”.

 

“Le Burundi était en effet un des seuls pays au monde où, malgré la présence de cas avérés de la Covid-19, n’a été règlementé ni l’accès aux lieux de réunion tels que les églises, les bars et les restaurants, ni interdit les grands rassemblements sportifs et politiques”, a relevé Doudou Diène devant le Conseil des droits de l’homme.

 

 

Il a donc noté avec satisfaction que depuis le décès du Président Nkurunziza, les autorités burundaises semblent avoir plus pris “conscience des risques sanitaires” posés par la pandémie “ne serait-ce que par l’abandon du message selon lequel le Burundi serait protégé par la grâce divine”.

 

Désormais, des messages des plus hautes autorités rappellent à la population la nécessité d’adopter les gestes barrières et de se présenter aux centres de santé pour se faire dépister en cas de symptômes.

 

“Nous espérons que les autorités prendront, en coopération avec l’OMS, toutes les mesures nécessaires pour enrayer la propagation du coronavirus et seront transparentes quant à la situation de la pandémie dans le pays qui fait l’objet de spéculations”, a conclu M. Diène.

 

En réponse à ce tableau de la pandémie décrit par les enquêteurs onusiens, le Burundi a, de son côté, invité la Commission “à se garder de politiser et dramatiser la situation”.

 

“Par ailleurs, le sadisme avec lequel cette Commission manifeste sa satisfaction de la gestion de cette Covid-19 par rapport au décès du Président Pierre Nkurunziza témoigne d’un déficit d’humanité”, a déclaré l’Ambassadeur Rénovat Tabu, Représentant permanent du Burundi auprès de l’ONU à Genève.

 

Selon un bilan établi mardi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Burundi signale 258 cas confirmés de Covid-19 dont 1 décès.