mar
09
2020

Même en exil, les femmes burundaises n'oublient pas leur journée internationale

Le 8 mars de chaque année, c’est une journée internationale de la femme. Ce dimanche, à Kigali au Rwanda, le Mouvement des Femmes et Filles  (Burundaises) pour la Paix et la Sécurité (MFFPS), a saisi cette occasion pour évaluer leur lutte pour les droits des femmes, surtout en exil.

 

Le thème choisi pour cette année par l’ONU étant “Génération-égalité”, madame Marie Louise Baricako, la présidente du MFFPS, qui regroupe des femmes et filles en exil, fait un constat amer.

 

“Nous sommes de  la génération-égalité , malheureusement exclues de la vie nationale, forcées à l’exil, la plupart vivant dans le dénuement et le désespoir, les jeunes coupés de leurs racines et de leur élan futuriste” fait-elle remarquer avant de se demander de quelle égalité parle le monde, “quand on négocie encore le droit a la vie et à la survie au Burundi et que la femme n’ a pas droit à l’héritage”.

 

 

Toutes fois, ces femmes et filles burundaises, jurent de ne pas “ baisser les bras et abandonner” car ajoutent-elles “la paix et la sécurité reviendront dans notre chère patrie, nous rentrerons dans la joie et nous pourrons bâtir le Burundi que nous voulons. Ne prenons pas ce temps d’exil comme un temps de défaite, mais plutôt comme un temps pour se bâtir et se refaire”.

 

Des victimes des VBG soutenues au camp de Mahama

 

Au camp de réfugiés burundais de Mahama situé à l’Est du Rwanda, il est peut être difficile de savoir le nombre exact de femmes et filles ayant subi des violences basées sur le genre, depuis 2015 au Burundi, avant de fuir.

 

Pourtant ce mouvement des femmes et filles en exil a pu identifier au moins 67 d’entre elles, qu’il prend d’ailleurs en charge.

 

D’après madame Jacqueline Nduwayezu, représentante de ce mouvement au camp de Mahama, l’action faite par le MFFPS est louable.

 

“Elles sont plus nombreuses mais ne veulent pas être identifiées par peur d’être discriminées. On a dénombré 67 victimes en grande partie de viol sexuel. Plusieurs d’entre elles ont eu un accompagnement psychothérapeutique et commercial à fin de se libérer petit à petit de ce joug. Pour le moment, elles sont parmi celles qui sensibilisent les autres à Mahama contre les VBG. Tout cela grâce au Mouvement des Femmes et Filles pour la Paix et la Sécurité”, a indiqué, avec une voie remplie d’émotions Jacqueline Nduwayezu.

 

Dans ce camp de réfugiés qui compte plus de 72.000 burundais le MFFPS intervient aussi en matière de lutte contre la délinquance juvénile.

 

“Plusieurs fille-mères ont repris le chemin de l’école grâce au soutien de ce mouvement des femmes. La plupart d’entre elles font des écoles de métiers comme la couture”, a souligné madame Nduwayezu, citant aussi d’autres partenaires comme la Maison Shalom.

 

Ces cas de VBG sont aussi commis au Burundi et restent impunis selon le MFFPS.

 

“Il est absolument inacceptable que des filles engrossées par leurs enseignants ou d’autres responsables soient chassées de l’école tandis que ces derniers ne sont pas inquiétés au Burundi, il est aussi honteux et inacceptable qu’au 21ème siècle des femmes et des filles soient violées et soumises à d’autres violences basées sur le genre sans que les auteurs ne sont pas interpelés” a tenu à rappeler madame Marie Louise Baricako, présidente du MFFPS.

 

Un mandat qui divise... 

 

Cette journée arrive au moment où ce mouvement traverse une crise de leadership. Une partie de femmes et filles a récemment claqué la porte, arquant que le mandat de deux ans de l’actuelle présidente est illégal.

 

La présidente du MFFPS se veut rassurante. “Au sein de MFFPS, nous avons eu notre part d’épreuves et de coups durs, mais nombreuses d’entre nous avons choisi de garder les yeux fixés sur l’essentiel, a savoir la paix et la sécurité au Burundi” dit-elle.

 

“L’essentiel c’est aussi le service que nous offrons aux plus nécessiteuses. Imaginez si on restait dans ces chicaneries et qu’on oublierait d’aider ces victimes des VBG, on aura échoué à notre mission. Mais, les voici après avoir recouvrées leur  dignité grâce à notre mouvement”, a-t-elle renchéri en s’adressant à plusieurs anciens dignitaires du pays qui ont participé à cette célébration à Kigali comme des anciens députés, ministres, ambassadeurs, gouverneurs de provinces, administrateurs communaux et ainsi que les jeunes et ceux de la diaspora.

 

Pourtant, ses détractrices ne tolèrent pas. “L’équipe dirigeante doit partir pour refaire l'élection” avancent-elles.

 

Toutes fois, le MFFPS recommande à ces femmes et filles en exil de rester sereines et solidaires et surtout de s’entraider partout où elles sont et de se préparer “soigneusement pour la reconstruction du Burundi paisible, prospère, réconcilié et dirige à égalité par les hommes et les femmes”.

 

Cependant, le MFFPS s’interroge si “les hommes sont prêts à ouvrir cette porte aux femmes et que les dirigeants du Burundi considèrent la question des inégalités comme un problème national et si ils sont prêts à faire de l’égalité hommes-femmes une politique nationale”.

 

Selon les dernières données, le mandat qui touche à sa fin compte moins de femmes à la manette des affaires au Burundi: six femmes seulement parmi les 21 ministres soit 28.5 %, trois femmes sur 18 gouverneurs des provinces soit 16.6%, cinq femmes parmi les 29 ambassadeurs soit 17.2 % , 35 femmes sur 118 députés à la chambre basse du parlement soit 29.6 % et 16 femmes sur 43 sénateurs soit 37.2%.

 

C’est au moment où la constitution burundaise accorde 30% aux femmes dans les postes de prise de décision. “Un combat possible mais pas facile à mener” selon ces femmes et filles en exil.